La Renaissance italienne dans les Jardins de France
Avant-propos *
L’influence italienne aux XVIème, XVIIème a joué un rôle important dans le processus d’évolution de l’art des Jardins en Europe. En effet, les jardins qui voient le jour en Italie dès la fin du XIVème siècle marquent l’avènement du jardin moderne, proposant une nouvelle forme d’aménagement de l’espace d’agrément, née de la réactualisation d’un certain nombre de valeurs idéologiques et de normes artistiques( architecture et ornement) qui valaient pendant l’Antiquité.
L’Italie développe pendant cette période un art des jardins à la pointe du progrès technique qui va influencer l’Europe pendant près de trois siècles, en particulier les jardins privés en France. En le considérant sous son aspect artificiel, le jardin type dont l’Italie va être l’auteur peut être défini par quelques fondements d’ordre techniques résidant dans le terrassement, l’introduction d’effets perspectifs, l’hydraulique, ainsi que le traitement appliqué à la végétation. Les caractères principaux du jardin italien Renaissance sont la régularité et la symétrie. Tous les éléments minéraux et végétaux qui le constituent sont régis par la même loi de l’ordonnancement. C’est mettre en valeur l’architecture de la demeure et le paysage environnant.
De l’architecture relève la structure en terrasses, qui permet le maintien de pentes irrégulières et la création de replats propres à être aménagés en parterres, ainsi que toute une série de formes qui lui sont liées et qui donne lieu à de nombreuses déclinaisons esthétisantes : murs de soutènement à la surface desquels grimpent des plantes, des rampes, des escaliers à doubles volées symétriques qui relient les différents étages.
Forte introduction des italiennes dans les jardins privés en Bourgogne au XVIIème siècle :
- Limanton
- Jardin de M.Lang
- Tanlay
- Jardin du président Coeurderoy
- Au XVIIIème siècle : Abbaye de Fontenay
La végétation est bien évidemment un constituant de ces jardins, mais elle se particularise par son aspect strictement ordonné par la main de l’homme. L’hydraulique n’en est pas moins importante puisque l’eau, omniprésente dans ces jardins donne lieu à des mises en œuvre somptueuses quelquefois. On trouve des fontaines construites sur des sources : les nymphées, comme dans le Jardin Coeurderoy à Moutiers Saint Jean.
Pour ce qui est de l’évolution des formes de l’influence italienne au cours des trois siècles, on observe que les italianismes du XVIe siècle relèvent de quelques éléments incontournables comme les grottes de rocailles ou encore de l’adoption de structures en terrasses portant des parterres de buis à compartiments, ou encore de labyrinthes de verdure (comme à Villandry). Les italianismes du XVIIe siècle se caractérisent, eux, par l’adoption des terrasses et de leurs appareillages : rampes, murs de soutènement et murs d’enceinte, escaliers à doubles volées symétriques.
Enfin les processus de diffusion de l’influence italienne sont multiples, phénomène de mode d’échelle nationale de l’époque, facteurs socioculturels, formes d’architecture minérales inspirées par les monuments romains… Finalement, on ne retiendra de l’influence italienne qu’un lieu commun : l’Antiquité.
* Revue VMF Janvier 1999
Le jardin Coeurderoy à Moutiers Saint Jean
Situé aux abords du Chemin de Ronde et proche de l’église paroissiale, on a plaisir à découvrir un jardin bien singulier qui remonte au XVIIe siècle, classé Monument Historique, en terrasses, clos de murs, intéressant par ses portes.
L’architecture fait référence à la Renaissance italienne. Les pierres proviennent d’Anstrude pour ce qui est du bâti et de la forêt Saint Jean pour les rocailles. Il dépendait de la propriété où vécut depuis 1556 une famille de gens de robes, les Cœur-de-Roy.
Jean Cœur-de-Roy naquit le 25 août 1627. On sait qu’il avait un attrait irrésistible pour les belles-lettres et sa visite en Italie a contribué à la conception du Jardin. Maître des requêtes au Parlement de Dijon il fonda des hôpitaux qu’il administra lui-même, par exemple celui d’Alise Sainte Reine et de Moutiers Saint Jean où il fut administrateur durant plusieurs années. Vers environ 1683 il vint habiter définitivement la maison paternelle de Moutiers Saint Jean.
A noter, une nymphée voûtée en cul-de-four. Face à cet édicule et au bout de l’allée centrale, une porte avec son banc de pierre. Opposition de rocailles à des éléments de pierres taillées d’une subtile modération. Ordre dorique, ordre ionique de beaucoup d’agrément, rappellent infiniment plus le seizième que la fin du grand siècle.